METALLICA : « 72 Seasons » (c) 2023

METALLICA : « 72 Seasons » (c) 2023

72 Seasons
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Publié: 14/04/2023

Le problème avec les groupes de légende ayant plus de 40 ans carrière est qu’on essaie à chaque sortie d’un nouvel album de les comparer aux meilleurs albums du groupe .. sortis il y a 40 ans. Cela ne rime à rien, c’est un discours que je tiens à chaque sortie d’un nouvel opus de Maiden et qui est également valable pour les AC/DC, Accept ou … METALLICA. Le plus important est la musique et du moment qu’elle est bonne, le reste importe peu, même si elle est éloignée du style initial du groupe. Les 4 de San Francisco ont commencé il y a 32 ans à n’en faire qu’à leur tête et mettre petit à petit de côté leur thrash frénétique et juvénile, avec un Black Album boudé par une bonne frange des fans des débuts. Même si pas parfait et trop long, le groupe avait réussi son tour de force avec une grosse moitié de titres très bons et montrant un nouveau visage de METALLICA, plus simple, heavy et sombre. Avec « Load » / « Reload », le groupe continuait dans cette voie d’élargir leur spectre musical .. avec moins de succès la faute à trop de titres juste moyens ou pas bons mais avec néanmoins quelques bons morceaux. Le début des 00s fut très difficile pour le band, les musiciens étaient cramés, ne s’entendaient plus, et Jason se fit la malle, James entra en cure de désintoxication, la déprime était là avec un rejet de cette image de leader du « metal » .. et « StAnger » fut une réaction à tout cela et de ce gros malaise, rebutant à tous les niveaux, comme si cela avait fait exprès par le groupe.
Conscient d’être allé bien trop loin, METALLICA revint avec « Death Magnetic », album copier coller de « ..And Justice For All » .. en beaucoup moins bien. Mais il y avait du mieux et quelques bons titres mais pour le coup, le groupe décevait car n’allant plus vers l’avant et préférant s’autoplagier. « Hardwired… To Self-destruct » était plus réussi .. mais beaucoup trop long avec un 2nd disque dispensable. Pour être franc, je n’attendais pas un nouvel album de METALLICA avec une grande ferveur …
L’annonce de cet 11ème album fut brutale et inattendue, le groupe lachant le single « Lux Aeterna » sans prévenir … et la surprise fut très bonne, avec un brûlot rapide, simple évoquant DIAMOND HEAD et MOTORHEAD. METALLICA nous proposait un voyage dans le passé, au début de la NWOBHM et avec panache. Le meilleur titre du quatuor depuis bien longtemps !
On retrouve ce côté anglais du début des 80s sur le très bon single nerveux « Screaming Suicide » au riff ébouriffant.
On note rapidement l’énorme son donné par Greg Fidelman : jamais les guitares du groupe n’ont sonné aussi puissantes et heavy, la basse de Robert Trujillo très présente dans le mix et pour une fois la batterie de Lars Ulrich ne sonnant pas comme un casserolle.
Ne vous attendez donc pas à un album de thrash, on en est loin .. et si vous êtes restés bloqués en 1984 sur « Ride The Lightning », passez votre chemin. Par contre si vous êtes ouverts au heavy metal lourd, nerveux et souvent inspiré, et bien donnez une chance à cet album car il regorge de très bons de riffs de guitare et de basse comme cette intro de « Sleepwalk My Life Away » par Robert, même si ce titre n’est franchement pas le plus réussi de l’album.
Le groupe a toujours brillé dans les titres d’une lourdeur implacable, on se rappelle des « For Whom The Bells Tolls », « The Thing That Should Not Be », « Harvester Of Sorrow » ou « Sad But True » .. et bien « You Must Burn ! » est de ce même tonneau avec un côté BLACK SABBATH bien présent dans son riff heavy de chez heavy ! Un mot également sur le chant de James Hetfield parfait durant tout l’album comme sur cette pièce heavy. Les parties mélodiques de guitares dans la dernière partie du morceaux sont bien trouvées et Hammett se lache dans une belle série de soli et cela me fait plaisir après tout le bâchage qu’il subit depuis des années. Un des meilleurs titres de l’album.
Dans le même esprit heavy et entêtant, le single « If Darkness Had A Son » fait très bien le job avec ce riff encore une fois qui va briser des cous, et ces « Temptation » hurlés par Helfield qui trouvera certainement écho lors des prochains concerts du groupe.
Les Horsemen n’oublient pas d’accélerer de temps en temps le tempo comme sur le très bon « 72 Seasons » servi en entrée et composé en bonne partie par Hammett avec ce riff rapide faisant le lien avec leur musique des 80s .. et puis quelle intro de basse de Trujillo jouée à 200km/h ! Un titre que j’aime beaucoup, dont ce refrain « Wrath of man » sur un tempo bien speed.
« Room Of Mirrors » est un titre étonnant mais très réussi, joué pied au plancher malgré quelques petits ralentissements ici et là. Le groupe a bouffé du lion, Hammett balance une nouvelle fois une belle série de soli qui feront taire ses détracteurs. Le groupe nous offre également une belle partie en twin guitars en harmonies digne de Maiden ou Thin Lizzy. L’un de mes titres préférés de l’album.
La majorité des titres sont longs mais « Too Far Gone ? » fait exception avec ses 4 minutres, proposant un heavy nerveux et rythmé avec un petit côté punk dans le refrain (j’ai pensé à certains titres de PENNYWISE, allez savoir pourquoi (le phrase « Help me make it through the day »)) et les 2 guitaristes nous offrent une nouvelle partie en guitares harmonisées bien sympa.
Les écoutes se succèdent et force est de constater que ce « 72 seasons » regorge de très bons titres, pleins de bonnées idées et montrant un niveau de composition que le groupe n’avait pas atteint depuis bien longtemps, mais tout n’est pas parfait malheureusement, la faute à quelques titres de trop comme « Shadows Follow », « Sleepwalk My Life Away » ou « Chasing Light » trop long malgré des bons riffs.
L’une des grandes forces de cet opus sont ses riffs. Helfield, Hammett, Trujillo et Ulrich se sont gavés et nous régalent, tantôt véloces lorgnant vers la NWOBHM, tantôt d’une lourdeur étouffante rappelant ceux de Iommi et quelques fois étonnants comme sur ce « Crown Of Barbed Wire », un titre demandant plusieurs écoutes pour l’apprécier à sa juste valeur mais qui s’avère au final être une vraie réussite.
Et puis il y a ce « Inamorata », pièce majeure de « 72 Seasons » concluant l’album de la plus belle des façons. L’annonce de sa durée de 11 minutes avait de quoi inquiéter .. mais dès le début du morceau, METALLICA nous embarque avec eux dans ce voyage étonnant mené par ce riff très sabbathien encore une fois et très réussi. On se voit plonger à l’époque de « Sabbath Bloody Sabbath », Helfield prenant sa belle voix mais toujours gardant cette énergie. Le refrain est simple mais efficace (« Misery, she needs me … ») et envoutant avec en trame ce très bon leimotiv de guitare. Sur fond de riffs heavy, Hammett balance une belle série de soli n’oubliant jamais la mélodie .. puis tout s’arrête à l’exception des cymbales d’Ulrich, cette basse de Trujillo, ces quelques notes de guitares en son clair et tout en touché .. et puis cette voix très mélodique et tellement belle d’Helfield emplie d’émotion contrastant avec le début morceau plus heavy .. ensuite une montée en puissance se fait débouchant sur une très belle partie avec des guitares harmonisées rappelant « Orion » et « Fade To Black » … que c’est beau .. du grand METALLICA. Le tempo du morceau s’accélère de plus en plus, Hammett joue de bien beaux soli, Ulrich fait claquer la pédale de double grosse caisse, une fin grandiose et magnifique prouvant que METALLICA est encore capable de composer un chef d’oeuvre, car ce titre en est assurément un.
Un dernier mot sur les paroles et concept de l’album venant bien entendu de Heffield et qui sied à merveille aux musiques de cet opus : le géant grisonnant évoque au travers de ces 12 tableaux l’importance qu’ont nos 18 premières années (72 saisons) sur cette Terre car nous tendons tous à être façonnés par notre entourage dont nos parents et le reste de notre vie dépend de ces « quelques années » et pouvant laisser pour certains une trace indélébile avec laquelle ils doivent s’habituer à vivre toute leur vie avec, en faisant un combat de tous les jours. On sent que Hetfield a voulu exorciser ses démons récurrents et bien lui a pris car cela apporte beaucoup aux chansons. L’avant première de l’album au cinéma le 13 avril a également montré un Helfield au meilleur de sa forme, très affuté physiquement et d’une grande lucidité et sagesse dans son discours, ses explications sur ses titres, et cela fait vraiment plaisir de le voir dans une telle forme après des années très difficiles pour lui (divorce, rechutte dans ses excès et cure de désintox) et cela se ressent clairement dans la musique.
METALLICA est revenu très fort avec un album réussi, souvent passionnant malgré quelques longueurs et titres en trop, mais personnellement, je n’en demandais pas tant à un groupe ayant déjà tant et tout donné. Le groupe a changé, ses musiciens ont la soixantaine et forcément cela impacte leur musique et cette fois ci dans le bon sens. Certainement leur meilleur disque depuis le Black Album.

 

1. 72 Seasons 07:39
2. Shadows Follow 06:12
3. Screaming Suicide 05:30
4. Sleepwalk My Life Away 06:56
5. You Must Burn! 07:03
6. Lux Æterna 03:25
7. Crown of Barbed Wire 05:49
8. Chasing Light 06:45
9. If Darkness Had a Son 06:36
10. Too Far Gone? 04:34
11. Room of Mirrors 05:34
12. Inamorata 11:10
01:17:13