YES : « 90125 » (c) 1983

YES : « 90125 » (c) 1983

90125
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Publié: 14/11/1983
En tant qu’amoureux de la musique, on est tous attaché aux 1ères années durant lesquelles nous avions découvert la musique qui allait nous suivre toute notre vie. Me concernant, il s’agit des 80s. Bien entendu j’allais tomber dans la grande marmite Maiden en 85 mais auparavant, et comme c’était souvent le cas dans les familles nombreuses, j’écoutais les vinyles de mes 3 soeurs. Il y avait du Springsteen, du Alan Parson Project, de la new wave anglaise, du Dire Straits et aussi un disque à la pochette grise qui suscita mon intérêt : « 90125 » de YES. Dès sa première écoute, je fus séduit par ces mélodies, ces arrangements sophistiqués, cette voix atypique, cette guitare mordante et inspirée. Le hasard faisant bien les choses, je découvrais en même temps le groupe ASIA et leur fantastique 1er album avec 2 musiciens Geoff Downes et Steve Howe ayant quitté le navire YES le pensant perdu après un album pourtant fort réussi « Drama » mais boudé par les fans comme en attesta une tournée n’ayant pas rencontré son public.
Ce nouveau groupe opta mais une musique bien plus accessible que le rock progressif alambiqué de YES avec un rock radiophonique d’une grande qualité aidé par la superbe voix de John Wetton. Et bien le « nouveau » YES allait faire de même l’année suivante avec « 90125 », ce qui peut, avec le recul, sembler étonnant .. pourquoi se séparer pour au final jouer la même musique ?
Pour beaucoup de fans de YES à l’époque, et encore maintenant, ce 11ème album des anglais était une hérésie et allait à l’encontre de la musique ayant fait la réputation du groupe, à savoir un rock progressif aux structures musicales aventureuses, riches et absolument pas formatées pour les radios. YES était l’ambassadeur de ce mouvement, le dernier résistant de cette musique née dans les 70s tandis que les autres avaient déjà cédé aux sirènes de la mode, comme Genesis par exemple. « Drama » avait pourtant déjà montré une volonté des musiciens d’ouvrir leur musique à autre chose, et cela était tout à fait légitime après 10 albums dans la plus pure tradition du rock progressif. Cela s’entendait sur un titre comme « Does It Really Happen ? » fort réussi.
Mais en 1983, le groupe n’y alla pas avec le dos de la cuillère et présenta une copie n’ayant plus grand chose à voir avec un « Close To The Edge » ou un « Relayer », là où « Drama » gardait encore un lien avec ses prédécesseurs. Il faut dire que le nouveau venu Trevor Rabin à la guitare (africain du sud) allait rapidement prendre les choses en main, encouragé par les rescapés Chris Squire, Alan White et Trevor Horn ayant troqué son poste de chanteur (sur « Drama ») pour celui de producteur. Rabin posa les bases de quasi tous les nouveaux titres, aidé par Squire et White, les fit chanter par Horne mais ces sessions de répétitions ne furent pas satisfaisantes et Rabin tenta le coup d’envoyer ces démos à Jon Anderson, le chanteur emblématique du groupe, qui se montra enthousiasmé par ce nouveau matériel présentant pour lui un nouveau départ pour le groupe. Le chanteur s’investit complétement dans le groupe, apportant des idées d’arrangements, mélodies et aussi ses paroles.
Le clavier des 3 premiers albums de YES Tony Kaye fut rappelé pour compléter ce line-up bougrement solide.
Je ne vais pas y aller par quatre chemins, cet album est un chef d’oeuvre du 1er au dernier titre. Je l’ai toujours écouté pour ce qu’il était, l’un des meilleurs albums de rock FM jamais sorti .. mais aussi représentant bien plus que cette étiquette car il restait toujours un peu de l’ADN de YES dans cette musique pourtant formatée avec des titres entre 2 et 7 minutes. Car malgré tout, la musique de ce « 90125 » n’était pas aussi triviale que celle d’un SURVIVOR (dont je suis fan), d’un LOVERBOY, JOURNEY ou FOREIGNER mais pouvait rappeler les 1ers albums de TOTO, ou encore KANSAS.
Bien évidemment, l’album est connu pour son hit mammouth « Owner Of A Lonely Heart » qui trusta les charts US en 1983 et fut même n°1 !!
En 1982, SURVIVOR eut son « Eye Of The Tiger », en 1983 ce fut YES avec ce titre qui connut un succès colossal. Difficule de résister à ce riff entré dans la légende aux côtés de ceux de « Highway To Hell » et « Eye Of The Tiger », ce chant aguicheur d’Anderson et ce refrain imparable, ce solo de guitare de Rabin avec ce son venu d’ailleur et très avengardiste pour l’époque.
Mais ce single était un peu l’arbre cachant la forêt tant l’album et les autres titres étaient plus riches et passionnants, comme déjà la 2nde piste « Hold On ». On est frappé par la qualité de la production, tous ces petits sons de claviers, et ces arrangements sur les voix, ce riff heavy de Rabin faisant entrer YES dans les 80s et même innovant tout au long de l’album.
Comment résister à ce clavier / clavecin démarrant « It Can Happen » pendant que Chris Squire tisse sa toile de façon originale avec sa basse, Jon Anderson chantant de sa belle voix unique une mélodie de toute beauté. On note encore une fois le gros travail fait sur les voix, aidé par celle de Rabin et Squire. La grande force du groupe est d’arriver dans un morceau bien rock et accrocheur en Diable, a glissé des petites parties instrumentales d’une grande virtuosité limite jazzy rappelant leur période 70s. Cela ne dure pas longtemps à chaque fois, mais ces petits moments de pure magie jonchent ce titre (et d’autres) ici et là donnant une grande richesse à cette musique cinq étoiles.
Et ce n’est qu’un avant goût de ce que le groupe allait nous proposer avec le sublime « Changes » : cette intro au clavier fou, soutenu par cette section rythmique qui s’emballe ponctué par un riff fou, puis cela repart plus calmement comme une magnifique balade avec la superbe voix de Rabin qu’on découvrait sur ces couplets. Le refrain se veut plus rythmé, Rabin sort la disto avec un riff de guitare puissant, Anderson rejoint Rabin pour chanter un refrain sublime. Le morceau possède plusieurs breaks tous plus beaux les uns que les autres, dont un avec la seule voix Jon Anderson donnant le frisson. Cette pièce de plus de 6 minutes résume à elle seule vers quoi voulait aller le groupe à l’époque : rendre leur musique plus accessible qu’auparavant grace à ces superbes mélodies tout en gardant un haut niveau musical et proposant autre chose que de simples couplets / refrains, en se permettant des breaks et plétores d’arrangements vocaux et musicaux vraiment réussis et apportant tellement aux chansons.
Cette face A était imparable mais la suite allait se montrer du même niveau, même si le choix de commencer la face B par le court instrumental « Cinema » pouvait sembler bizarre.
« Leave It » est un titre étonnant dans lequel le groupe avait voulu s’amuser avec des harmonies vocales suprenantes mais si addictives. On sent la patte de Rabin sur ce titre (il chante une partie des couplets) et cela sonne définitivement comme du YES.
« Our Song » est une autre pièce irresistible avec cette mélodie de clavier reprise par la guitare lançant le morceau pendant que la basse de Squire se fait entendre. Les harmonies vocales sont de nouveau de la partie, et la voix d’Anderson brille. Rabin balance un petit solo de guitare peu conventionnel. Encore une fois sous l’apparence d’un titre très mélodique et accrocheur, les musiciens tissent une toile musicale riche, des arrangements, des structures leur permettant de se lacher. « Music is good for you » chante Anderson à la fin du titre … il a bien raison, surtout celle de cet album !
« City Of Love » est encore une fois une franche réussite avec ces couplets entêtants avec en fond ce riff heavy de Rabin avec un chant d’Anderson un peu plus énervé avant un refrain de toute beauté. Vient un break guitare / section rythmique juste avant le court solo de guitare rappelant le meilleur des 70s mais côté hard / blues rock . Quel morceau encore une fois avec un final durant lequel Rabin lache quelques chouettes soli de guitare.
Et que dire de ce final absolument magnique, beau à pleurer : « Hearts » : ces quelques claviers, ce chant partagé par Anderson et Rabin si pure et d’une beauté incroyable. Le morceau .. progresse doucement, la batterie de White arrive en soutient, les voix sont harmonisées ici et là pour arriver sur un refrain mélancolique et tellement beau. Rabin nous gate une dernière fois d’un très beau solo de guitare durant une partie instrumentale super chouette. Plus de 7 minutes de magie.
Pas évident d’être objectif avec cet album m’ayant tellement marqué étant gamin. Mais une chose est certaine, je prends autant de plaisir à l’écouter 40 ans plus tard et je m’émerveille encore de la beauté des mélodies, de la richesse de ses arrangements .. la marque des chefs d’oeuvres. Peu importe qu’il soit différent et loin de ce que faisait YES la décennie précédente, ce « 90125 » est un joyau de musique mélodique et d’une richesse subtile. Il fait partie du quatuor de ces années là que j’écoute régulièrement : « Isolation » de TOTO, le 1er ASIA, le « Caught In the Game » de SURVIVOR .. et ce « 90125 ». Un must-have.

1 réponse

  1. EricTR dit :

    Bonjour,

    chronique bien faite, complète et comme quelques autres que j’ai lues, elle donne envie d’écouter et je trouve que c’est le plus important . Le site est sympa, les chroniques bien documentées même si je ne suis pas toujours forcément d’accord ni aussi enthousiaste mais ce n’est pas important.
    Bonne fin de journée.

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